Cameroun, Gabon Congo… quand sonne le glas pour Egis

Le géant de l’ingénierie français Egis, déjà sous le feu des projecteurs pour plusieurs affaires de corruption en Afrique, est aujourd’hui rattrapé par une succession d’échecs dans le cadre du projet Tollcam au Cameroun, informe Africa Intelligence.

Lancée en grande pompe il y a quelques années, l’initiative devait moderniser la collecte de péages routiers à travers un système numérique de pointe. Toutefois, la plateforme n’a jamais fonctionné comme prévu, entraînant un préjudice considérable pour les autorités camerounaises et des critiques acerbes quant aux méthodes d’Egis.

Selon plusieurs sources proches du dossier, le groupe français aurait sous-estimé la complexité du terrain, ce qui a provoqué retards, surcoûts et blocages institutionnels. Pire, des allégations de malversations financières ont été évoquées, sans qu’aucune enquête ne vienne pour l’heure apporter de preuve formelle. La réputation d’Egis en Afrique, déjà écornée par le passé, en a pris un coup, rappelant les scandales antérieurs sur d’autres marchés du continent.

La déconvenue camerounaise illustre un mode opératoire controversé que certains observateurs associent depuis longtemps à l’entreprise. Egis a en effet fait l’objet de révélations sur son implication présumée dans des dossiers de surfacturations et de paiements occultes. Le Gabon s’en souvient très bien : quelques années plus tôt, une affaire retentissante avait mis en cause le géant français pour des contrats suspects, dans lesquels avaient notamment émergé les noms de personnalités influentes liées à l’ancien pouvoir, en premier lieu Pascaline Bongo. Le Congo-Brazzaville n’est pas en reste, comme en témoigne un récent litige commercial impliquant Egis et son partenaire local, Cores.

Si ces affaires attirent autant l’attention, c’est qu’elles alimentent un sentiment de méfiance grandissant envers les multinationales opérant en Afrique. Les dénonciations se multiplient : au Sénégal, au Mali ou encore en Côte d’Ivoire, l’opinion publique voit de plus en plus d’un mauvais œil les pratiques jugées « opaques » de certains groupes étrangers. La corruption, les marchés truqués ou les faveurs octroyées à des intermédiaires bien introduits auprès des pouvoirs en place ne sont pas rares et, malheureusement, les grandes firmes françaises ne sont pas épargnées par ces accusations.

Ce climat de suspicion est renforcé par la médiatisation des scandales. Récemment, Africa Intelligence a rapporté qu’Egis se trouvait au cœur d’un contentieux judiciaire complexe au Congo-Brazzaville, où l’entreprise serait poursuivie pour ne pas avoir honoré des engagements pris auprès d’un partenaire local. Le litige, portant sur plusieurs millions d’euros, est actuellement devant la Chambre de commerce internationale de Paris, illustrant une nouvelle fois l’exposition grandissante d’Egis à des procédures internationales.

Au-delà de ce cas précis, Africa Intelligence met en lumière un schéma inquiétant : entre tentatives de recouvrement contestées, recours à des intermédiaires et ententes illicites, Egis peine à dissiper le flou entourant sa stratégie d’implantation en Afrique. La signature d’une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) en 2019, dans laquelle Egis Avia avait reconnu des faits de corruption d’agent public étranger et s’était acquittée d’une amende de 2,6 millions d’euros, vient renforcer les doutes persistants sur ses pratiques.

Face à ces déboires, les réactions des autorités locales varient : certaines lancent des investigations internes, tandis que d’autres, plus prudentes, tentent de négocier en coulisse. Pour sa part, Egis cultive le secret.

Cette réserve ne fait cependant qu’éveiller davantage la curiosité du public et des médias. Au Cameroun, l’échec du projet Tollcam continue de susciter beaucoup d’interrogations, non seulement sur la gestion défaillante du chantier, mais aussi sur la manière dont Egis a obtenu le marché. À Libreville comme à Brazzaville, on n’exclut pas que ces mauvaises publicités successives contribuent à relancer les enquêtes sur les précédents contrats du groupe français.

Alors que les scandales se succèdent et que la vigilance des gouvernements africains s’accentue, la question demeure : Egis parviendra-t-il à restaurer sa crédibilité sur le continent ? Les prochains développements, au Cameroun comme ailleurs, s’annoncent décisifs pour l’avenir de l’entreprise et à travers elle pour l’image de la France en Afrique.

Gabon : des acteurs politiques demandent l’annulation du fichier électoral

À un mois de l’élection présidentielle prévue le 12 avril prochain, des acteurs politiques saisissent la Cour constitutionnelle à l’effet de demander le report du scrutin.

Un groupe d’au moins quatre acteurs politiques gabonais a saisi la Cour constitutionnelle d’une requête le 06 mars 2025. Il est constitué autour de « l’initiative des élections post-Transition pacifiques, démocratiques, inclusives, libres et transparentes ». Comme annoncé le 1er mars dernier par ses partisans, il demande en substance l’annulation du fichier électoral sur la base duquel le corps électoral est convoqué.

Les membres du groupe ont une autre prétention face à la Cour. C’est celle de reporter le scrutin du 12 avril. Ils font valoir l’argument d’un fichier électoral invalide pouvant favoriser les fraudes électorales. Et pour la constitution d’un fichier électoral consensuel, ces acteurs trouvent nécessaire le report de l’élection présidentielle.

Mais, leur initiative ne suspend pas l’évolution du processus électoral. Le dépôt de candidatures ouvert le 27 février dernier se poursuit. Au moins 30 candidats ont déjà déposé leurs dossiers de candidature dont trois femmes et 27 hommes. Le calendrier du processus électoral prévoit la clôture de la réception des dossiers le 08 mars 2025. Tandis que l’opération se poursuit, plusieurs candidats ont effectué des visites médicales et des tests de langue le 06 mars.

Ils sont contraints de présenter un document justifiant un état de santé compatible avec les fonctions de président de la République. De même, les candidats doivent démontrer qu’ils maîtrisent au moins l’une des langues nationales. C’est ainsi que devant la commission chargée de l’évaluation de cet aspect, Brice Clotaire Oligui Nguema et plusieurs autres candidats ont présenté des grandes lignes de leurs projets en langues nationales.

Gabon-présidentielle 2023 : Ali Bongo déclaré vainqueur, des militaires annoncent la fin du régime

Le mercredi 29 août, le Centre gabonais des élections a déclaré le président sortant Ali Bongo Ondimba vainqueur de l’élection présidentielle du samedi 26 août 2023.

 

Ce matin, un groupe de militaires annonce l’annulation des résultats et la dissolution des institutions. Coup d’Etat en cours au Gabon ! Voilà qui se lit et qui se raconte depuis les premières heures de cette matinée du 30 août 2023. Une dizaine de militaires a fait irruption très tôt à la télévision Gabon 24, logée au sein de la présidence de la République, avant de délivrer un message au peuple gabonais et à la communauté internationale.

Dans ce discours, les hommes en tenue annoncent l’annulation des résultats du scrutin du week-end dernier, donnant Ali Bongo Ondimba vainqueur avec 64,27% des suffrages valablement exprimés. Soit 293.919 voix, pour un taux de participation de 56,65%. Son suivant immédiat, Albert Ondo Ossa n’a obtenu que 30,77% des suffrages, selon les données publiées par le président du Centre gabonais des élections, Michel Stéphane Bonda.

Quelques heures après la publication de ces résultats, les militaires s’emparent du pouvoir en dissolvant l’ordre constitutionnel, non sans donner leurs motivations. Voici l’intégralité de la déclaration faite par l’un des militaires :

« Notre beau pays, le Gabon, a toujours été un havre de paix.

Aujourd’hui, ce pays traverse une grave crise institutionnelle, politique, économique et sociale.

Aussi, force est d’admettre que l’organisation des échéances électorales, dites élections générales du 26 août 2023, n’a pas rempli les conditions d’un scrutin transparent, crédible et inclusif tant espéré par les Gabonaises et les Gabonais.

A cela s’ajoute une gouvernance irresponsable, imprévisible, qui se traduit par une dégradation continue de la cohésion sociale, risquant de conduire le pays au chaos.

Ce jour, 30 août 2023, nous, forces de défense et de sécurité, réunies au sein du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), au nom du peuple gabonais et garant de la protection des institutions, avons décidé de défendre la paix en mettant fin au régime en place.

A cet effet, les élections générales du 26 août 2023 ainsi que les résultats tronqués sont annulés.

Les frontières sont fermées jusqu’à nouvel ordre.

Toutes les institutions de la République sont dissoutes, notamment le gouvernement, le Sénat, l’Assemblée nationale, la Cour constitutionnelle, le Conseil économique, social et environnemental, le Centre gabonais des élections.

Nous appelons les populations, les communautés des pays frères installées au Gabon ainsi que les Gabonais de la diaspora au calme et à la sérénité.

Nous réaffirmons notre attachement au respect des engagements du Gabon vis-à-vis de la communauté nationale et internationale.

Peuple gabonais, c’est enfin notre essor vers la félicité.

Que dieu et les mânes de nos ancêtres bénissent le Gabon.

Honneur et fidélité à la patrie.

Je vous remercie. »