La situation reste « profondément préoccupante » en Libye, avec de multiples violations du cessez-le-feu et de l’embargo sur les armes, a déploré dimanche l’ONU, un mois après la conférence internationale de Berlin censée remettre un processus de paix sur les rails.
« Malgré certains signaux positifs, la situation reste reste profondément préoccupante sur le terrain », a déclaré Stéphanie Williams, adjointe de l’émissaire de l’ONU pour la Libye Ghassan Salamé, lors d’une conférence de presse à Munich.
« La trêve ne tient qu’à un fil avec de nombreuses violations – plus de 150 – recensées, le peuple libyen continue de souffrir, la situation économique continue de se détériorer, exacerbée par le blocus des installations pétrolières », a-t-elle souligné.
Les représentants d’une douzaine de pays, soutenant pour partie l’un ou l’autre des deux camps, se sont retrouvés en marge de la Conférence sur la sécurité de Munich pour faire le point sur les avancées un mois après la réunion du 19 janvier à Berlin.
Les principaux pays concernés par le conflit avaient alors promis de respecter l’embargo sur les armes et de ne plus interférer dans les affaires intérieures de la Libye.
L’homme fort de l’Est libyen, le maréchal Khalifa Haftar, mène depuis avril 2019 une offensive contre Tripoli, où siège le Gouvernement d’union nationale (GNA) de Fayez al-Sarraj. Les affrontements ont causé la mort de plus de 1.000 personnes tandis que 140.000 ont été déplacées, selon l’ONU.
Le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas a évoqué la prochaine reprise du dialogue politique entre les parties au conflit, attendue le 26 février, après deux ans d’interruption.
Il s’est aussi félicité de la poursuite, mardi prochain à Genève, des discussions de la commission militaire conjointe GNA/pro-Haftar créée pour aboutir à « un cessez-le-feu permanent ».
« Tout cela montre que la voie que nous avons ouverte à Berlin fonctionne même si nous ne sommes pas encore à l’objectif escompté sur tout », a-t-il assuré.
Son homologue italien Luigi Di Maio a déploré pour sa part « le décalage persistant entre la rhétorique diplomatique et les comportements et les faits sur le terrain ».
« Malheureusement (…) l’histoire qui se déroule en ce moment en Libye diverge profondément de celle écrite à Berlin », a-t-il lancé.
Concernant les violations de l’embargo sur les armes, « les avis divergent », entre pays concernés, sur les auteurs des violations, a concédé Hieko Maas.
La France insiste surtout sur les violations commises par la Turquie, accusée d’envoyer massivement des armements et des rebelles syriens proturcs vers Tripoli en soutien au Gouvernement d’union nationale.
La Russie est pour sa part soupçonnée de soutenir le maréchal Haftar via des centaines de miliciens de la force Wagner, ce qu’elle dément formellement. Les Emirats arabes unis sont aussi régulièrement montrés du doigt.
Heiko Maas a également insisté sur la nécessité pour les Européens, qui doivent se consulter lundi sur les moyens de faire respecter l’embargo, de veiller à ce qu’il soit respecté « à la fois sur mer, terre et dans les airs ».
« Sinon une partie sera avantagée au détriment de l’autre », a-t-il averti, alors que l’UE veut réactiver l’opération navale Sophia pour contrôler l’embargo.
L’Autriche bloque pour l’instant la reprise de Sophia, qui a aussi sauvé des migrants en Méditerranée, une opération perçue par certains pays de l’UE comme un encouragement à l’immigration.
« C’est ridicule » pour un pays sans marine qui du coup n’y participera pas, a ironisé le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell.